Christian De la Hubaudière nous raconte l’histoire de Marguerite, une nourrisse normande du XVIIIe siècle qui faisait le trajet jusqu’à Paris pour récupérer des nourrissons à allaiter jusqu’à leur sevrage. Un roman historique passionnant !
Christian De la Hubaudière est un ancien instituteur du Perche à la retraite. Le mode d’éducation des enfants a toujours attisé son intérêt. C’est en faisant des recherches dans des registres paroissiaux et des documents notariaux qu’il a découvert que beaucoup de bébés parisiens sont morts entre le Perche et Paris au XVIIIe siècle. Cela l’a poussé à faire de plus amples recherches, et c’est là qu’il s’est rendu compte à quel point le métier de nourrice a impacté l’ensemble de la société de l’époque.
Il nous raconte donc l’histoire de Marguerite, une nourrice du Perche, en Normandie. Cette histoire commence en 1743. Marguerite, faisant partie de la classe sociale la plus pauvre, a besoin d’argent pour élever ses enfants. Mais la seule chose qu’elle possède, c’est son lait. Elle est donc devenue nourrice. Elle prend en charge les enfants de bourgeois, et notamment ceux du propriétaire des terres de la ferme qu’elle habite. Mais très vite, en discutant avec d’autres nourrices, elle découvre qu’il est bien plus avantageux d’allaiter des petits de Paris plutôt que des environs. Elle se lance donc dans ce long trajet, dont une grande partie doit être faite à pied, pour aller chercher un nourrisson à Paris et le ramener chez elle pour l’allaiter jusqu’à ce qu’il soit sevré…
On découvre dès les premières pages la passion de l’auteur pour l’histoire, et l’ampleur de ses recherches. Tout est minutieusement détaillé, et cela ne s’arrête pas à l’histoire de Marguerite. C’est tout le contexte social et économique qui est pris en compte. La vie de tous les jours des habitants de Rânes, où vivent Marguerite et sa famille, est racontée. Dans les petits villages comme celui-ci, les curés avaient un rôle d’administrateur, et ainsi sont devenus les garants de ce système de nourrices qui a pris une ampleur phénoménale avec le temps. En effet, les nourrices étant de plus en plus nombreuses, et les demandes de plus en plus importantes à Paris qui voyait sa natalité exploser, cela a contribué à faire de ce métier de nourrice un véritable commerce du nourrisson. Toute une organisation a alors dû se mettre en place pour réglementer cette profession et éviter les abus. C’est ce qui nous est raconté dans ce livre.
Et l’auteur, dans sa passion de l’histoire, nous emmène également auprès des faïenceries et de la dentellerie. On découvre ces métiers et leur importance à l’époque, les faïenceries faisant partie des rares entreprises lucratives de la région, et la dentellerie permettant aux jeunes femmes qui ne souhaitent pas ou ne peuvent pas devenir nourrices de gagner de l’argent.
Christian De la Hubaudière est déjà l’auteur de plusieurs romans, dont une saga sur la faïencerie. Son roman historique « Au Sein de Paris » est très documenté. Les amateurs d’histoire apprécieront à coup sûr ce récit qui nous emmène jusqu’à la Révolution. Et il reste très accessible, car tout est romancé pour nous raconter cette passionnante histoire qu’est celle de Marguerite et de l’évolution de son métier de nourrice, dans un contexte historique très fort. Une merveille !
ISBN : 2951023340 | 267 pages | Prix 19 €